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Elles facilitent de façon inédite l’obtention de PGE quitte à les transformer en prêts participatifs. Mais tous les secteurs ne sont pas aussi bien traités.
Un changement bienvenu semble agiter les banques françaises, sous la forme d’une sorte de patriotisme intéressé : elles se rangent en ligne de bataille pour soutenir les PME. Intéressé ? Bien sûr, puisque si l’armada des petites et moyennes entreprises venait à se désagréger, les banques elles-mêmes en seraient déstabilisées. Il n’empêche que la volonté des banquiers d’éviter un raz de marée de dépôts de bilan prend des allures de croisade.
D’abord, elles en ont les moyens. La crise financière de 2008 les avait laissées fragilisées, leurs bilans sont aujourd’hui beaucoup plus solides. Frédéric Oudéa, ex-directeur général de Société Générale, président de la Fédération bancaire française (FBF), l’a confirmé au Figaro : « Les banques sauront faire face à cette crise. Elles sont solides et leurs matelas de sécurité sont conséquents. » Et pour cause : fortes de capitaux propres doublés par rapport à la crise financière de 2008, elles veulent à leur tour consolider ceux des entreprises qui n’ont accès ni aux marchés financiers ni au capital-investissement. Les banques ne sont du reste pas laissées sans liquidités par La Banque centrale européenne. Un apport énorme qui explique aussi le « patriotisme » bancaire.
Risque calculé
Elles vont pourtant devoir faire face à des défauts sur les crédits consentis, le double sans doute par rapport à 2019, et l’année 2021 ne se montrera guère plus favorable. Y entre le taux des PGE (555 000 entreprises l’ont obtenu, soit une enveloppe globale de 114 milliards d’euros au 24 juillet) qui risquent de ne jamais leur être remboursés, mais que l’État va couvrir à hauteur de 70 à 90 % du prêt : un risque acceptable.
D’autant plus que le nombre des faillites justement évitées par ces prêts ne devrait pas atteindre des sommets.
Hôtellerie et tourisme, brebis galeuses
Soutenir les PME passe par toute une série de mécanismes dont la transformation des prêts simples en prêts participatifs, autrement dit en quasi-fonds propres. Ce que recherchent 100 à 150 ETI, quelque 10 000 PME et plus de 100 000 TPE non cotées à hauteur de 10 à 20 milliards d’euros, selon les estimations de François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France. D’autres outils sortent des arsenaux : obligations hybrides d’État, actions à dividendes renforcés. Mais l’État, dit la BCE, ne doit pas arroser tout le champ des entreprises pour éviter le piège des entreprises zombies maintenues sous perfusion sans espoir de relance. Ni, par le biais des prêts participatifs, devenir l’actionnaire de milliers d’entreprises sinon sous la forme de « co-investissement privé minoritaire ».
Le phénomène des obtentions relativement rapides et sans douleur de prêts garantis a assoupli le corset rigide que les banques opposaient d’ordinaire aux petites entreprises. Le témoignage de Didier Roche, patron des restaurants Dans le noir et serial entrepreneur, traduit l’heureuse surprise de ses pairs : « Nous sommes vendredi milieu d’après-midi, j’échange avec ma banquière sur une demande d’un prêt garanti par l’État (PGE). Je raccroche et elle m’adresse dans la foulée l’accord de principe pour obtenir la garantie de la BPI. C’est une formalité que l’on accomplit en ligne. Quelques minutes après, la garantie m’est donnée. Je transfère cette garantie le samedi matin à ma banquière. Le lundi d’après, dans la matinée, je reçois un mail qui m’invite à aller signer numériquement mon PGE… » Ce qui ne veut pas dire que toute demande de prêt est acquise d’emblée. « C’est beaucoup moins intrusif mais très sélectif quand même », tempère une banquière dans les colonnes de La Tribune. Et pour cause : au grand jeu du soutien aux entreprises, l’hôtellerie et le tourisme font figure de pelés, de galeux. En cause, les déficits structurels de trésorerie qui font fuir, outre les banques, bpifrance elle-même. Le secteur de l’hôtellerie-tourisme ne représente aujourd’hui que 7 % du montant global des prêts garantis accordés. Celui de la santé et de l’action sociale, 2,4 %.