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Deuxième vague et nouveau confinement obligent, Bercy s’attend à une baisse du PIB de 11 %.
La France a la gueule de bois. Malgré le rebond de l’été et une rentrée placée sous le signe de la relance, le réveil en cette fin d’année 2020 est brutal. Oui, l’activité a rebondi au troisième trimestre, mais le quatrième trimestre ne s’annonce pas aussi rassurant. Les nouvelles mesures prises (couvre-feu localisé puis reconfinement généralisé) et la progression exponentielle du virus ont poussé le gouvernement à revoir ses prévisions.
Emmanuel Macron mercredi puis Jean Castex jeudi, le Président de la République et son Premier ministre se sont succédé pour annoncer aux Français·es leur décision pour contrer la dynamique alarmante de contaminations : le reconfinement. Outre les restrictions de déplacement individuels et collectifs inhérents au confinement, l’inquiétude réside surtout dans l’impact de ce nouveau tour de vis sur l’économie et les entreprises. Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, était interviewé sur les antennes de France Inter ce vendredi 30 octobre. Le patron de Bercy a indiqué que la richesse produite en 2020 chuterait de 11 % à la fin de l’année, plutôt que les 10 % de repli anticipés jusqu’alors. Il a ajouté : « C’est une révision qui est modérée, justement parce que nous avons eu un troisième trimestre très fort (ndlr : bond de 18,2 % pour l’activité économique entre juillet et septembre), qui traduit une chose simple : la capacité de rebond de l’économie française est considérable ». Reste que l’optimisme du discours de Bruno Le Maire n’est pas partagé de tous·tes.
Prévisions pessimistes
Dès l’annonce du reconfinement, les économistes ont commencé à faire tourner leur modèles, en prenant comme base les estimations de l’impact du confinement du printemps dernier, lors duquel les secteurs les plus touchés (hôtellerie-restauration, tourisme, culture et loisirs, transports, commerces non essentiels…) avait vu leur activité reculer de 50 %. Ils représentent 9 % du PIB. Pour le quatrième trimestre, plusieurs économistes s’accordent pour dire que le reconfinement pourrait coûter 5 points de PIB, s’il est limité à un mois. Pour le coût direct, on parle de 15 à 30 milliards d’euros, selon les estimations. Loin des « 50 à 70 milliards d’euros de PIB en novembre » en moins, annoncés par Geoffroy Roux de Bézieux, le patron du Medef.
Inquiétude patronale
Sans surprise, la décision du gouvernement a suscité de vives critiques parmi les rangs patronaux et leurs représentants. Medef, CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) et U2P (Union des entreprises de proximité) en tête. La fermetures des petits commerces de proximité et des commerce « non essentiels » inquiètent particulièrement les patrons. En outre, si certaines entreprises ont pu pousser un (léger) ouf de soulagement en apprenant que ce nouveau confinement n’empêcherait pas la poursuite de leur activité, l’injonction au 100 % télétravail dès que c’est possible et aux aménagements d’horaires en fait grogner plus d’une. Pour les entreprises déjà très touchées par le confinement du printemps, la situation s’annonce dramatique. « Il faut absolument traiter le problème des chef·fes d’entreprises qui vont devoir déposer le bilan », estime François Asselin, numéro un de la CPME.
L’annonce par Jean Castex devant les député·es d’une nouvelle enveloppe de 20 milliards d’euros pour renforcer les dispositifs d’aides aux entreprises, au nom du « quoi qu’il en coûte » macronien, est bien sûr bien accueillie. Mais ça n’est pas suffisant, selon Laurent Munerot, le président de l’U2P : « Le gouvernement a fait des efforts inégalés dans le monde dans les aides qu’il apporte aux entreprises mais je ne sais pas si ce sera suffisant ». Pour rappel, les dépenses budgétaires allouées aux mesures de soutien en réponse à la crise sanitaire s’élèves déjà à 64 milliards d’euros.
Adam Belghiti Alaoui