Le troc n’est plus réservé aux particuliers. Depuis quelques années, les entreprises ont décidé de s’y mettre aussi.
Depuis les années 1990, le barter (littéralement « troc » en anglais) se développe outre-Atlantique où plus de 400 sociétés spécialisées se partagent 450 000 clients. Selon l’association spécialisée IRTA (International Reciprocal Trade Association), l’équivalent de 12 à 14 milliards de dollars de biens et de services sont échangés chaque année dans le monde. C’est en 2012 que Samuel Cohen a introduit la pratique sur le marché français. Le fondateur de France Barter avait découvert ce concept d’économie circulaire aux États-Unis. Le leader du « troc » compte aujourd’hui 1 500 entreprises clientes, représentatives de tous les secteurs d’activité. Et pour cause : les bénéfices du barter sont nombreux et polymorphes.
« Le défi pour les entreprises est d’améliorer leur ebitda » – Parissa Gholizadeh
« Le barter valorise des actifs sous-utilisés, favorise la rencontre de nouveaux clients, fait valoir leur image sociale, participe à un mode de commerce durable et plus rentable. » La liste des avantages est interminable dans la bouche de Sylvain Lhommée, fondateur et dirigeant de BarterLink, un autre important acteur du secteur. Mais l’un des plus gros avantages du barter reste la possibilité de financer de nombreux projets sans toucher à la trésorerie. « C’est effectivement un levier de création de valeurs », note Sylvain Lhommée. Sur une plate-forme comme France Barter ou Barter Link, les entreprises énumèrent les services qu’elles sont en capacité de troquer et les transactions s’enclenchent grâce à une unité d’échange interne qui remplace l’euro. Les entrepreneurs vont troquer conseils juridiques ou comptables, salles de réunion, bâtiments, création de signalétique ou de sites Internet, édition de documents, etc.
Un système officiel, légal et contractualisé
En 2013, le ministère de l’Économie s’est penché sur le sujet: troquer, c’est aussi la tentation d’échapper à l’achat et à ses taxations… Un guide encadre la pratique. Il détaille les traitements comptables et fiscaux que doivent adopter les entreprises. « À l’occasion d’un échange, une facture est établie. Il suffit d’indiquer dans une ligne dédiée que le paiement a été fait par compensation sur tel ou tel site du barter. Dans le bilan, le compte de cette entreprise intermédiaire apparaît comme un compte bancaire avec des entrées et des sorties supplémentaires», explique Samuel Cohen. Le règlement de la TVA est actualisé lorsque la facture est enregistrée par le réseau.
Contrairement aux pays voisins et anglo-américains, l’échange entre entreprises, en France, demeure peu répandu. Sylvain Lhommée : « Les entrepreneurs français ont besoin d’un accompagnement sur ce point, un sujet auquel les entreprises françaises ne sont pas habituées. » Pourtant, le barter montre de l’avenir en France. Selon un sondage réalisé par EDC Consulting, 65 % des chefs d’entreprise s’intéressent à ces échanges interentreprises en b to b.
Par Anna Ashkova
Achats médias en barter : échange marchandises
Le barter ou bartering a réellement émergé en France il y a quelques dizaines d’années. Il a commencé par l’échange des produits et services contre des espaces publicitaires. L’annonceur finance ses budgets publicitaires grâce à la marge sur ses propres produits. Quant aux médias, ils y trouvent leur compte côté charges en proposant leurs espaces publicitaires comme monnaie d’échange. Ce type de barter est le cœur de métier de My Barter Media. « Le barter est l’occasion pour les entreprises de revaloriser leurs invendus, de générer un chiffre d’affaires additionnel et de créer un budget publicitaire “autofinancé en marchandises” », explique Parissa Gholizadeh, fondatrice de My Barter Media. Au fil du temps, sa société s’est adaptée aux nouveaux besoins de communication des entreprises en leur proposant une offre de barter qui inclut des médias numériques en plus des médias traditionnels. L’entreprise propose également aux entrepreneurs d’autres prestations de services.
« Aujourd’hui plus que jamais, le défi pour les entreprises est d’améliorer leur ebitda. Dans ce sens, le barter est une solution efficace pour conforter les marges, optimiser les dépenses et économiser de la trésorerie », plaide Parissa Gholizadeh. La pionnière en la matière pense que « le Web a totalement changé l’écosystème des échanges commerciaux et a facilité les échanges directs notamment via les marketplaces. Ces échanges deviendront une donnée stable au fil des prochaines décennies, même si l’on ne connaît pas encore les disruptions à venir. Malgré tout, le barter sera une activité à part entière car elle est alternative aux solutions en numéraire. »