Génération Femmes d’influence

Les entrepreneures sont confrontées à des obstacles que ne connaissent pas nécessairement leurs homologues masculins. Comme se constituer un réseau et valoriser leur image. Comment ont-elles fait, les influenceuses ?

Tout a commencé, pour Patricia Chapelotte, par sa propre aventure entrepreneuriale. « J’étais salariée, mais étais titillée par la création. J’ai fini par franchir le pas en me lançant dans ma spécialité : la communication d’influence, les relations avec les médias et les affaires publiques… », raconte la fondatrice et présidente du club Génération Femmes d’Influence. Elle crée son entreprise, Patricia Chapelotte, se laisse attirer par le Women’s Forum a Deauville, mais l’expérience se révèle incomplète. « On parlait des femmes dans les grandes entreprises, mais pas dans les PME et les ETI, remarque-t-elle. Or, souvent, les femmes qui travaillent dans de grands groupes sont passées par des grandes écoles, comme HEC. Ce qui n’est pas, à mon sens, le seul modèle à promouvoir auprès de nos filles. » C’est même, en un sens, réducteur : aujourd’hui, entre 30 et 35 % des créations d’entreprise relèvent de femmes. À force de rencontres et échanges, Patricia Chapelotte s’est rendu compte de l’existence d’une vraie demande – d’aides, de réponses à une multitude de questions… – non satisfaite. Elle y a répondu par la création du club Génération Femme d’Influence en 2010.

Oser forger son propre réseau

« C’est l’idée fondatrice de Génération Femmes d’influence : nous sommes là pour échanger, souligne Mme Chapelotte. Nous ne proposons pas des formations – il existe de nombreuses associations qui le font –, mais nous construisons un espace d’échange et d’entraide. Grâce à la diversité des profils que nous réunissons – notaires, avocats, experts-comptables… –, une entrepreneure pourra trouver quelqu’un pour répondre à ses questions. » Le club, qui avait commencé à s’intéresser plus spécifiquement aux PME et ETI, s’est ouvert aux femmes salariées au sein de grandes entreprises et grands groupes, avec pour objectif de créer des ponts entre ces deux univers. « Les femmes ont tendance à consacrer moins de temps à se constituer un réseau, explique la présidente du groupe. S’il y a une cause à défendre, la motivation est là pour sortir, faire des rencontres… Mais si la cause est soi-même, son propre réseau, j’ai pu constater qu’en général la motivation est plus difficile à trouver. » D’où le contrepied adopté par Générations Femme d’influence : des repas-rencontres – aussi bien avec des experts, par exemple sur l’importance (et la manière) d’utiliser les réseaux sociaux et de gérer son image numérisée, qu’avec des personnalités (ministres, journalistes, écrivains…), prennent le parti de se donner des contacts pour soi-même.

Connaître les dossiers avant de s’exprimer, trait féminin ?

L’autre objectif : lutter contre la sous-représentation des femmes dans les médias (à l’image des rédactrices du Parisien, en mouvement musclé pour exiger la parité en nombre et en salaire). C’est une action qui restera pertinente pendant longtemps, même si la donne est un peu différente pour la génération de futures entrepreneures : « La génération des 25-35 ans est un peu plus spontanée et décontractée que nous devant les médias et les hommes de cette génération se montrent à l’aise, quand ils n’éprouvent pas une certaine fierté, d’avoir une patronne, ce qui n’était pas le cas avant », dixit Patricia Chapelotte. L’arrivée des réseaux sociaux, notamment, en éliminant l’intermédiaire (par exemple la personne qui sélectionne les invités pour une émission de débat), a facilité la prise de parole, mais il reste encore du chemin à faire. C’est la prochaine étape : se donner suffisamment confiance pour se montrer en tant qu’experte. « Il faut oser, souligne Patricia Chapelotte. Par exemple, toute une nouvelle génération de députées est arrivée à l’Assemblée nationale, mais quand je les ai rencontrées, beaucoup me disaient qu’elles voulaient attendre de bien connaître les dossiers avant de s’exprimer… Des scrupules que n’ont pas forcément leurs homologues masculins. Et cette “humilité” devient bloquante. » D’où les thématiques de rencontres autour de l’image – et la création du prix Femme d’influence. Car « pour créer des modèles dans les médias pour nos jeunes filles, il fallait créer un moment médiatique marquant, qui les mette en avant. Le prix, qui a connu en 2018 sa cinquième édition, occupe volontairement des domaines plutôt « masculins » : la politique, l’économie, l’influence culturelle… Et petit à petit, les choses bougent : la remise du prix donne lieu à des portraits dans la presse, des interviews… Et surtout, à de vraies valorisations. « Quand la présidente de la FNSEA a été récompensée, la distinction a provoqué une vraie fierté chez les femmes agricultrices, souligne Patricia Chapelotte. De même pour Muriel Penicaud, c’est l’ensemble de son staff féminin qui s’est senti valorisé et reconnu. » Le maître-mot, ici, est rayonnement.

Jean-Marie Benoist

 

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