Maître Jean-Baptiste Gouache s’insurge.
À la tête du cabinet d’avocats éponyme, Jean-Baptiste Gouache est un spécialiste des têtes de réseaux de distribution (franchise, licence de marque, commission affiliation, distribution sélective…) ou des industriels. L’ordonnance sur les loyers du 25 mars 2020 le révolte : « le gouvernement, dénonce-t-il, accorde aux locataires moins que le droit commun ».
L’ordonnance sur la suspension des loyers bénéficie aux entreprises éligibles au fonds de solidarité mentionnées à l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 (critères précisés par un décret 2020-371 du 30 mars 2020).
Non seulement le texte écarte les PME, mais surtout, il ne prévoit que de reporter les loyers alors que les locataires sont :
- soit empêchés par la loi d’ouvrir leurs commerces,
- soit de les exploiter normalement (lorsque seuls les ventes à emporter et livrées sont permises) ce qui entraîne des baisses drastiques de chiffres d’affaires.
Pourtant, le Code civil permet, non pas seulement de reporter les loyers, qui n’ont plus aucune contrepartie, mais de les effacer purement et simplement.
L’arrêté du 14 mars 2020 (modifié par arrêté du 15 mars 2020) ordonne la fermeture de tout commerce non indispensable à la vie de la nation. Pour tous ces commerces, le bailleur n’est plus en mesure, de ce fait (on appelle cela le fait du prince) de satisfaire à son obligation de délivrance (article 1719 du Code civil). Cette force majeure (article 1218 du Code civil) autorise le locataire, qui n’a plus la possibilité d’exploiter son commerce dans le local loué, de ne plus payer son loyer, par exception d’inexécution (article 1219 du Code civil).
Cette solution, consacrée par le droit commun, est bien plus favorable que celle prévue par l’ordonnance adoptée en conseil des ministres le 25 mars 2020.
Présenter celle-ci comme un gain pour les entreprises locataires est un véritable hold-up !
Les commerçants empêchés d’exploiter leur local doivent tous bénéficier de la remise définitive des loyers.