L’intérim s’effondre de 40 % en trois mois.
La crise sanitaire, doublée d’une crise économique, n’en finit plus d’affoler les compteurs. Les dernières études statistiques de l’Insee révèlent un plongeon inédit de l’emploi salarié sur le premier trimestre 2020. Une baisse attendue mais qui dépasse les sommets de la crise post-2008 et même les estimations réalisées il y a quelques semaines.
Chute de 2 % de l’emploi salarié à la fin du premier trimestre 2020, 502 400 destructions nettes d’emplois par rapport à fin 2019 : la situation détaillée par l’estimation définitive de l’Insee publiée le jeudi 11 juin parle d’elle-même. Sur un an, le recul est de 1,6 % (- 317 200 emplois) et l’emploi salarié français atteint son plus bas niveau depuis le quatrième semestre de 2017. Et c’est le secteur privé qui est quasi exclusivement impacté puisque qu’il regroupe 497 400 des destructions nettes d’emplois (2,5 %), pendant que la fonction publique en perd 4 900 (- 0,1 %). C’est le champ dit « marchand non agricole » (industrie, construction et tertiaire marchand) qui concentre l’immense majorité des pertes d’emplois. Il enregistre la plus forte baisse : – 2,8 % et – 485 400 emplois. En comparaison, le marchand non agricole était en baisse de 0,8 % au quatrième trimestre 2008 et de 0,9 % au premier trimestre 2009, au plus fort de la crise. Une situation d’autant plus alarmante qu’elle dépasse la récente, et mauvaise, estimation provisoire publiée le 7 mai, qui tablait sur 453 800 détruits sur le trimestre.
Recul historique de l’emploi intérimaire
Si l’ensemble des secteurs et des catégories d’emploi sont plus ou moins impactés, l’Insee souligne que cette baisse du premier trimestre est due avant tout à l’effondrement massif de l’emploi intérimaire sous l’effet du confinement et des fermetures d’entreprises. Et pour cause, l’intérim est plus que mal en point : – 40,4 % sur le trimestre, soit une perte de 318 100 intérimaires. Lors du quatrième et dernier trimestre de 2019, le secteur n’avait perdu « que » 2 900 emplois en intérim. Sur un an, il baisse de 41 %, et retrouve un niveau comparable à celui de 2009. Pour rappel et comparaison, lors de la crise économique de 2008-2009, l’emploi intérimaire avait baissé de 13,9 % au quatrième semestre 2008 et de 13 % au premier trimestre 2009. La conjoncture actuelle relève bel et bien de l’inédit.
Hors intérim, l’emploi est également en baisse dans tous les secteurs. L’industrie recule de 0,4 % (- 11 300 emplois), il s’agit de la première baisse pour l’emploi industriel depuis le premier trimestre 2017. Résultat : l’industrie perd 8 000 emplois salariés par rapport à son niveau un an plus tôt. Idem pour la construction, dont l’emploi salarié perd également 0,4 % (- 5 600 emplois), une première depuis 2016. Mais le secteur, fort d’une dynamique positive lors des trimestres précédents, reste à un niveau plus important qu’il y a un an (+ 1,8 %). Dans l’ensemble, ce sont les services marchands qui encaissent le plus le choc : chute de 3,7 % et 468 400 destructions nettes en comptant les emplois intérimaires. Hors intérim, le secteur se replie tout de même fortement : – 1,3 % et – 150 300 emplois.
Autant dire que les temps sont durs pour l’emploi salarié en France. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, via son troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 présenté ce mercredi 10 juin, table, lui, sur la destruction de 800 000 emplois salariés dans les prochains mois. Attention, bond du taux de chômage à prévoir…
Adam Belghiti Alaoui