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Les effets du changement climatique feraient basculer « entre 68 et 135 millions de personnes dans la pauvreté à horizon 2030. »
Un bien triste coup d’arrêt. Depuis près de 25 ans, le nombre de personnes qui vivent dans une situation d’extrême pauvreté n’a cessé de reculer. Or, dans un rapport publié le 7 octobre par la Banque mondiale, l’institution annonce un sursaut du nombre de pauvres. Certes en lien avec la pandémie covid-19, mais pas seulement. Changement climatique et conflits armées participent aussi à rogner la lutte contre la réduction de la pauvreté dans le monde. De quoi remettre en cause l’objectif de passer sous la barre des 3 % de pauvreté mondiale à horizon 2030.
Entre 1990 et 2017, le nombre de personnes en situation d’extrême pauvreté a fondu, pour passer de 1,9 milliard à 689 millions. Chaque année, la pauvreté reculait. On retiendra 1,90 dollar par jour le seuil en dessous duquel une personne se retrouve en situation de pauvreté dans le monde. Soit environ le prix d’un café dans un pays avancé. La pandémie covid-19 a tout fichu en l’air. Mais elle ne demeure pas la seule explication. Un phénomène regretté par la Banque mondiale : « La réduction de la pauvreté a subi son pire revers depuis des décennies, après près d’un quart de siècle de déclin constant de l’extrême pauvreté dans le monde », précise l’institution.
Le profil de la pauvreté dans le monde
Bien entendu, la pauvreté touche encore majoritairement les personnes rurales, les jeunes et les sous-scolarisé·es, « quatre personnes sur cinq vivant sous le seuil de pauvreté international résident dans des zones rurales bien que la population rurale ne représente que 48 % de la population totale », précise le rapport de la Banque mondiale. Mais progressivement, le visage des pauvres tend à se modifier. Très légèrement certes, mais un certain nombre de « nouveaux·elles pauvres » émergent, plus urbain·es et plus instruit·es et jusqu’à 75 % d’entre eux·elles pourraient se concentrer dans des pays à revenu intermédiaire comme l’Inde ou le Nigéria.
Globalement, pauvreté rime souvent avec pays en conflits : « Plus de 40 % de pauvres vivent dans un pays en situation de conflit entre 2015 et 2018, le taux d’extrême pauvreté a été multiplié par près de deux au Moyen-Orient et en Afrique du Nord », révèle l’institution basée à Washington.
Une des causes : le changement climatique
Oui, la crise sanitaire qui frappe le globe depuis des mois y est pour beaucoup. « Entre 88 et 115 millions de personnes supplémentaires ne vivront qu’avec 1,90 dollar par jour, soit entre 9,1 et 9,4 % de la population mondiale en 2020 », pouvait-on lire dans le rapport. Un chiffre qui aurait dû chuter à 7,9 % cette année. Mais toute la faute ne revient pas à la covid-19, le changement climatique sévit aussi et menacerait la lutte contre la réduction de la pauvreté. Pire, d’après la Banque mondiale, les effets du changement climatique feraient basculer « entre 68 et 135 millions de personnes dans la pauvreté à horizon 2030 ».
Et pour toutes ces raisons, la Banque mondiale table sur une récession de 5,2 % pour cet exercice 2020, comprenez la plus forte contraction en 80 ans. Pour enliser le rebond du nombre de pauvres dans le monde, il faut « payer maintenant » pour ne pas « payer plus tard », préconise l’institution. Soit investir réellement dans des mesures de prévention pour appréhender le changement climatique et surtout, tous les pays doivent regarder dans la même direction, ce qui suppose une totale coordination. GW.