Temps de lecture constaté 2’10
La droite de la droite… de la droite. Les années défilent et le parti ultraconservateur PiS (Droit et Justice) s’obstine à ancrer dans toutes les têtes une menace invisible qui pèserait sur l’identité polonaise. Avec en ligne de mire la communauté LGBT et le droit des femmes. Une propagande qui a permis aux cathos et ultraconservateur·rices emmené·es par Andrzej Duda de remporter les élections présidentielles en juillet. Oubliez le Sars-CoV-2, en Pologne, le virus n’a pas attendu février pour se diffuser… il remonte à 2015, soit le premier mandat de Duda.
C’est bien la Pologne gouvernée par Droit et Justice qui se félicite de la mise en place de « zones sans idéologie LGBT ». Une carte de la honte qui encourage les régions concernées à « s’abstenir de toute action visant à encourager la tolérance à l’égard des personnes LGBT et à ne pas fournir d’aide financière aux ONG qui œuvrent en faveur de l’égalité des droits ». Voilà qui a de quoi, en France, « gauchiser » notre traditionnel Rassemblement national.
Un pays profondément décomplexé par les discriminations. Et ce n’est pas l’archevêque et icône des conservateur·rices Jedraszewski qui dira le contraire. Lui qui préfère parler de « peste arc-en-ciel » plutôt que de communauté LGBT. Sans doute sur le podium des qualificatifs les plus écœurants orchestrés à l’encontre de minorités, devant deux autres pépites nauséabondes : « La Pologne serait plus belle sans les LGBT », dixit Joachim Brudzinski, député européen ou « les LGBT ne sont pas des gens, c’est une idéologie », énième bêtise prononcée par le député Jacek Zalek. Derrière ces provocations ignobles, la volonté d’instrumentaliser des boucs émissaires à des fins politiques. Après les migrant·es en 2014, un danger pour le PiS, bien que très peu sont entré·es sur le sol polonais, les LGBT en 2020, nouveau souffre-douleur pour rester au pouvoir.
Quand vous placez le seuil de l’inacceptable très haut d’emblée, vous pouvez tout vous permettre. Jeudi 22 octobre, c’est sur le sol de cette même Pologne que le tribunal constitutionnel a décidé de proscrire l’IVG en cas de malformation grave du fœtus.
En 2020, en Pologne, comprenez que lorsque vous êtes une femme, vous ne pouvez avorter qu’à deux conditions. Si votre grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste. Ou si vous, femme enceinte, êtes en danger de mort. Comprenez donc que le droit à l’avortement dans le pays relève désormais de l’illusoire. Ce qui signe par la même occasion une atteinte supplémentaire à la liberté sexuelle des femmes.
Motif d’espoir, les opposant·es n’ont pas tardé à réagir : « Barbares », pouvait-on entendre dans la bouche de manifestant·es venu·es exprimer leur dégoût dans une église de Poznan, « j’aimerais avorter de mon gouvernement », lisait-on sur une banderole. Il faudra attendre cinq ans. Des années durant lesquelles la Pologne s’entêtera à poursuivre sa politique nationaliste du pire au détriment d’une Europe davantage occupée à commenter, se moquer et mépriser ce qui se passe outre-Atlantique, au sein de l’Amérique de Trump.
Geoffrey Wetzel