La « vallée du silicium » californienne, tout le monde connaît. C’est le modèle, le mythe, le baromètre. Elle serait la 12e puissance économique mondiale si elle proclamait son indépendance ! « The Valley » rayonne à coups de géants, les Google, Facebook, Apple et à force d’universités, Stanford et Berkeley. Onze nouvelles entreprises y sont créées chaque semaine, on y dénombre plus de 11 500 sociétés high-tech, elles emploient 420 000 « habitants » et réalisent plus de 100 milliards de dollars de CA.
Un rêve, la vallée des géants du numérique.
Notamment pour la France. Où des territoires ne rêvent pas, eux qui tendent à se rapprocher du modèle et font de l’hexagone le pays qui crée le plus de start-up en Europe (sur les 1 000 start-up les plus dynamiques du continent, 200 sont françaises). Première de ces ruches en plein essor : le cluster Paris Saclay. La « Silicon Valley à la française », dit-on. Tiendra-t-elle sa promesse ? Les moyens déployés et les résultats actuels sont encourageants.
Un projet de grande ampleur
Le plateau qui ambitionne de s’imposer comme un pôle scientifique, universitaire et technologique de dimension internationale déploie 1,7 million de m² aménagés à 20 km au sud-ouest de Paris, à cheval entre l’Essonne et les Yvelines. Paris Saclay, ce sont 430 000 habitants, 265 000 emplois, 18 000 logements dont 8 000 destinées aux étudiants, 17 incubateurs de start-up et 360 laboratoires de recherches. Le tout au cœur de l’Île-de-France, première région d’Europe avec son PIB de 640 milliards d’euros.
Le projet est né en 2006 avec la mise en place d’une Opération d’intérêt national (le peu flatteur sigle OIN). Elle projette la création d’un cluster scientifique et technologique, ambition entérinée par Nicolas Sarkozy dans le cadre du plan Campus du gouvernement Fillon (il vise à développer des pôles universitaires mondiaux). La dynamique se prolonge de par la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, avec une ligne 18 du métro pour relier le plateau à la capitale et la création de l’établissement public Paris Saclay, devenu depuis Établissement public d’aménagement Paris Saclay, présidé par Philippe Van de Maele. Maître d’ouvrage de l’aménagement du territoire, cet EPA accompagne et coordonne le développement des zones urbaines et du pôle scientifique porté par l’université Paris Saclay.
Entre volet scientifique et volet économique
Au cœur du plateau et de sa stratégie d’attractivité, campe cette prestigieuse université, destinée à intégrer le top 20 du fameux classement de l’université de Shanghai et même le top 10 de secteurs spécifiques (mathématiques et physique notamment). Lancée en 2014 sous la forme d’une Communauté d’universités et d’établissements (Comue), elle a vocation à réunir universités, grandes écoles et organismes de recherche sous sa seule bannière en 2020. On y dénombre déjà plus de 65 000 étudiants et 10 000 chercheurs, dont trois prix Nobel et 10 médailles Fields. Polytechnique, CentraleSupélec, l’Ensae et HEC y ont planté leurs bastions, l’ENS Cachan, Télécom ParisTech et AgrosParisTech doivent suivre d’ici à 2020. La grosse entité ne digérera pas pour autant toutes les grandes écoles, la vieille rivalité universités-grandes écoles laisse entendre sa petite musique hexagonale : Paris Saclay et l’Institut Polytechnique de Paris se sont séparés en 2017…
L’enjeu du grand aimant est de taille. En constituant un pôle académique et scientifique mondial et fertile, le plateau espère bien sûr attirer les grands groupes et leur centre de R&D. Opération déjà réussie avec Renault, Horiba, Sanofi, EDF, Safran, Nokia…
Paris-Silicon-Saclay demeure un « work in process » fructifère : 15 % de la recherche publique et privée du pays s’y sont déjà rassemblés. L’ambition ? Atteindre les 20 % et les 350 000 emplois.
Technology Review, la revue du Massachusetts Institute of Technology, a classé notre Silicon Plateau dans le top 8 mondial des clusters innovants, aux côtés du modèle Silicon Valley. Philippe Van de Maele, son président, joue les devins : « Le prochain Google sera français et naîtra sur le plateau. » Voilà un beau défi.
Adam Belghiti Alaoui
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