Mes amis, j’ai besoin de vous…
En janvier 1954, c’est un jeune abbé à la voix tendue qui jette un cri d’alarme devant le micro d’une radio nationale : des gens meurent de froid dans la rue. « Au secours… »
Mars 2020, c’est le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris qui lance un appel similaire, dans la même dramatisation vocale : des gens meurent et vont mourir faute de moyens.
L’abbé Pierre avait demandé un afflux de dons. Martin Hirsch ne fait pas autre chose. Interviewé sur France Info, il confirme qu’« il faut des dons pour soutenir les soignants et financer la recherche ». Que l’on ne dise pas que l’ancien président d’Emmaüs France et de l’Agence des Solidarités actives n’ait pas pensé à son auguste abbé au moment de lancer son appel.
Que dit-il ? « Oui, les équipes tiennent, mais elles ont besoin de quatre fortes assurances. Dans mes interventions précédentes, je savais devant moi que j’avais une visibilité d’une semaine sur la capacité d’en prendre davantage. Là, j’ai une visibilité de trois jours. » Ses quatre assurances sont claires :
1/ Des respirateurs. Il lui en faut un par malade critique, dans la perspective d’une vague d’arrivées bien supérieure au pic de 8 000 malades attendus, face aux quelque 5 000 respirateurs dont une partie est déjà mobilisée.
2/ Appeler tous les personnels soignants à rejoindre les hôpitaux, « que pas une personne ne soit inutilisée », quitte à recourir à la réquisition (et aux personnels des établissements privés).
3/ En contrepartie, assurer à ces personnels la reconnaissance financière de leurs efforts. « Il ne faut pas mégoter », lâche Martin Hirsch.
4/ Se mobiliser pour éviter toute pénurie de médicaments, affaire d’industriels et de pouvoirs publics.
Que l’appel du directeur de l’AP-HP soit justifié, aucun doute. Qu’il émane de l’homme qui, depuis des années, applique un programme d’austérité dans les hôpitaux, qu’il le déplore ou pas, est difficilement contestable. C’est quand même à travers l’« abbé » Hirsch que, depuis des années aussi, passe une politique d’austérité budgétaire au point que le personnel soignant des infirmier/ères se range parmi les salaires les plus faibles de l’OCDE.
Ce sont ainsi les Français/es qui vont, sans aucun doute, suppléer aux économies forcenées d’un État pour lequel la santé – la maladie plutôt – se comptabilise au point de ne plus assurer de stockage de masques depuis des années et de ne jamais penser que des respirateurs de réserve pourraient un jour se révéler indispensables. La France n’est pas le plus mauvais gestionnaire du monde, certes. Mais le virus a d’ores et déjà jeté à bas une vision comptable de ces malades qui coûtent cher mais rapportent aussi beaucoup.
Oui, il ne faut plus « mégoter ».
Olivier Magnan
rédacteur en chef
Les relais de l’appel
• Le numéro pour se porter volontaire : 0805 280 270
• le site : renforts-soignants@ap-hp.fr