Réouverture des écoles : après le retour volontaire, place à l’obligation tâtonnante

Depuis le 22 juin, les écoles et collèges ont rouvert de façon « obligatoire ». Pour mieux les refermer ?

Geoffrey Wetzel

La cloche a sonné, l’école est finie. Non, Sheila, tu nous as menti. Avec le goût du flou qui le poursuit, le gouvernement a de nouveau surpris nombre de Français.es au moment d’annoncer le retour à l’école « obligatoire » dès le 22 juin, collèges compris. Dans une société qui clignote en vert partout – oubliez les cancres Guyane et Mayotte –, tout est fait pour accélérer le retour à la normale dont la reprise des écoles constitue l’un des principaux simulacres. Mais pourquoi, à deux semaines des vacances officielles, cette rentrée a-t-elle pris des allures de fuite ?

Premier revers, le 11 mai. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation jusqu’alors en cour, informe de la réouverture progressive des écoles. Un soulagement pour les parents ? Pas tant que ça. Deux semaines après la réouverture, un quart des parents seulement ont décidé de renvoyer leur progéniture au sein des établissements. Ne prenons aucun risque, tel était le credo de l’extrême majorité de nos concitoyen.nes.

Cette défiance vis-à-vis d’un retour à l’école traduit l’incapacité qu’a eu le gouvernement à rasséréner. Quand le ministre de l’Éducation nationale déclare : « Vous avez un voisin qui peut-être n’envoie pas son enfant à l’école, dites-lui que c’est bon pour l’enfant d’aller à l’école. Sauf pour raison particulière, de santé par exemple », vous n’êtes pas rassuré.e, et c’est bien légitime. Le fameux #Balancetonvoisin, quand on disait que la covid avait resserré les liens de la nation.

Si le volontariat ne fonctionne pas, vous imposez. À partir du 22 juin, vous devez (re)mettre vos enfants à l’école. Après tout, nos bambins seraient très peu porteurs du virus et ne le transmettraient pas. Le conditionnel, l’art de perpétuer l’ambiguïté. D’ailleurs, parlons-en, des règles sanitaires. Bien sûr, le respect de la distanciation physique en maternelle demeure inapplicable. Mais à l’école primaire, Jean-Michel Blanquer essaiera de « faire respecter un mètre entre les élèves », bien sûr cette distanciation ne sera pas obligatoire si la configuration de la salle ne le permet pas. Ce sentiment du faites comme vous pouvez inquiète parents et professeurs. Quid du masque ? Il n’est pas recommandé de le porter sauf – les petites nuances qu’on chérit tant – si la distanciation d’un mètre ne peut se respecter. Difficile de s’y retrouver dans le jargon des « recommandé », « fortement conseillé », ou « pourrait être obligatoire ». Un manque de clarté noté 2/10 sur l’échelle de Sibeth Ndiaye, la porte-parole.

Lutter contre les inégalités sociales. Enfin un argument louable. Deux semaines, c’est le temps que passeront les élèves avant les traditionnelles vacances d’été. Réduire l’échec scolaire ne doit pas être un pari, mais un processus de longue haleine. Quand – depuis de nombreuses années – le premier facteur de réussite scolaire s’avère l’origine sociale, vous ne pouvez mettre une reprise prématurée (ou tardive, on ne sait plus) de l’école au crédit d’une lutte contre les inégalités scolaires. Personne n’est dupe. Davantage de moyens consacrés à l’éducation démontrent un combat profond et réel, les demi-mesures masquent les volontés.

L’école à distance ne remplace pas l’école physique, ça ne fait aucun doute. Mais tous les acteurs doivent être convoqués et réellement pris en considération pour prendre les meilleures décisions. Si l’école à distance aggrave l’échec scolaire, comment est-il possible que la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, encourage une rentrée en partie en ligne à l’université ? On sait qu’un quart seulement des étudiant.es inscrit.es en première année obtiennent leur licence trois ans plus tard. Des prises de position contradictoires qui imagent un gouvernement constitué d’une somme d’électrons libres sans horizon commun. Ou sans coordination ?

Geoffrey Wetzel, journaliste à la rédaction

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