On parle peu du choc historique que crise et confinement ont valu aux structures associatives pourtant vecteurs d’une défiscalisation attractive. Point de situation.

Au sortir du confinement, les appels aux dons se sont multipliés. Pour bon nombre d’associations, les projets envisagés avant la mi-mars ont été largement suspendus faute des moyens nécessaires issus de la collecte suspendue. Un véritable coup de massue pour les associations. Cette dure réalité a récemment poussé Pierre Siquier, président de France Générosités, en compagnie de 84 représentations d’associations et fondations d’intérêt général, à lancer un cri d’alarme dans les colonnes du Parisien : « Nos organisations, associations et fondations d’intérêt général se sont mobilisées dès les premiers jours de la crise de covid-19 pour répondre aux besoins exceptionnels nés de cette urgence. » Toujours est-il que pour une grande majorité d’associations qui ne vivent que grâce à la générosité de leurs donateurs, les « besoins à venir sont immenses compte tenu du contexte économique et social dégradé ».

Près de 30 % des associations ont déclaré une baisse des dons depuis le début de la pandémie. Les Français.es ont traditionnellement comme habitude de donner en fin d’année. En 2019, 52 % des montants des dons ont été reçus sur le dernier trimestre. Or donner, c’est aussi défiscaliser, peu ou prou.

Un appel au gouvernement

Face à cette période sans précédent, les signataires de cette tribune incitent le gouvernement et les parlementaires à « prolonger l’élan de générosité des Français.es et de démultiplier l’efficacité de leurs dons en permettant de donner plus pour toutes les causes ». Que proposent-ils ? Que tous les dons soient défiscalisables à hauteur de 75 % cette année, quelle que soit la cause que les donateurs choisissent de soutenir. « Nous demandons également au gouvernement d’introduire un crédit d’impôt exceptionnel sur la CSG pour tous les donateurs qui donnent et qui ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu », est-il martelé dans le document.

Compte tenu du risque d’un retour de virus, les responsables d’associations ne peuvent tenter aucune projection : « Il nous est impossible de faire des prévisions. Nous sommes dans une période pleine d’incertitudes », résume une responsable de France Alzheimer. L’association fondée en 1985 nourrit des ambitions : apporter aux familles des solutions immédiates pour mieux vivre la maladie et donner aux équipes de chercheurs les moyens de mieux la maîtriser demain. « Chacun a les moyens de poursuivre ce combat. Les legs, assurances vie et donations sont infiniment précieux. Ils constituent des ressources en mesure d’assurer la pérennité et le développement de nos actions. Ce geste fort pour les personnes malades et leurs aidants donne du sens au donateur et l’engage au-delà de sa propre existence. »

D’autres acteurs accusent également le coup. « Nous subissons une perte de dons de l’ordre de 15 % en raison de la pandémie. Les donateurs ont été très sollicités durant le confinement pour venir en aide, entre autres, aux soignants. Nous espérons un regain des dons », nous répond la Fédération des aveugles de France. Du côté de l’Arsla (Association de recherche pour la sclérose latérale amyotrophique), le flou prévaut. « Avec un taux de chômage en hausse, les Français.es vont-ils.elles être enclin.es à effectuer des dons ? L’inquiétude est là. L’an passé, nous avions collecté 2 millions d’euros de dons répartis entre 7 000 et 11 000 donateurs. Il y a ceux qui sont engagés et concernés par la cause, d’autres qui donnent pour bénéficier d’une réduction fiscale. Et la catégorie de donateurs qui réagissent à l’instant, à l’émotion », analyse sa directrice générale, Christine Tabuenca.

Le passage de l’ISF à l’IFI (impôt sur la fortune immobilière) en 2018 avait également signifié un repli en entraînant une chute globale de près de 60 % des dons collectés. Le nombre d’assujettis est passé de 358 000 (ISF) à 133 000 (IFI), le nombre de donateurs de 52 000 à 20 000 et le montant des dons collectés par les fondations de 269 à 112 millions d’euros. La baisse du nombre d’assujettis a mathématiquement fait reculer le nombre de donateurs dans le cadre de ce nouvel impôt.

Adeptes des dons, les associations ont également recours aux legs avec un milliard d’euros récolté chaque année. Mais le processus n’est pas le même. Lors d’une campagne de sollicitation pour les dons, le résultat de cet effort se révèle visible presque immédiatement. Pour les legs, rien ne se passe avant au moins une décennie. Pour les susciter, les associations doivent sacrifier un investissement sans espoir de retour immédiat. Une approche différente d’un don classique car il s’agit là du dernier choix que l’on fait pour soutenir une cause. Un processus toujours réfléchi.

Recevoir moins, mais aider plus

AED (Aide à l’Église en détresse) Solidarités international, France Alzheimer, Les Petits frères des pauvres, Alliance Vita, Institut Pasteur de Lille, Secours populaire, Fondation OCH ou encore 30 millions d’amis… Quel que soit le cœur d’activité ou le périmètre d’intervention national ou international, le monde associatif a connu un pic d’activité causé par la situation actuelle : violences conjugale et infantile en hausse, abandon d’animaux, précarisation des foyers avec la crise économique qui touche de nombreux secteurs… quand il ne s’agit pas d’aider humanitairement des pays en guerre.

Au-delà de la défiscalisation associée, il importe aujourd’hui de multiplier les dons aux associations. La période de confinement qui a duré 55 jours a laissé très peu d’indemnes dans l’associatif. La fermeture des magasins de l’association Emmaüs l’a plongée en grande difficulté. Et première historique depuis sa création en 1954, Emmaüs lance un appel aux dons pour assainir sa trésorerie. L’élan de solidarité pour la survie des associations doit se poursuivre bien au-delà du confinement.

Jonathan Nahmany avec Geoffroy Framery

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