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Dans la foulée de l’annonce choc du couvre-feu, le gouvernement muscle son soutien aux entreprises en difficulté.
Les restrictions sanitaires pleuvent, les entreprises sont inquiètes et les secteurs déjà très limités dans leur activité craignent le pire. Le mercredi 14, le Président de la République est venu sur les châines majeures annoncer le couvre-feu, le jeudi 15, son Premier ministre et son ministre de l’Économie ont présenté de nouvelles mesures de soutien aux entreprises, entre élargissement des exonérations et d’accès au fonds de solidarité.
Le « 21 heures, chacun·e chez soi », dès le samedi 17 octobre à Paris, sa région et huit autres métropoles, ne sera pas sans conséquences économiques directes, malgré le refus du reconfinement. Si le gouvernement a fait le choix de ne pas trop enrayer la machine économique, bien des secteurs vont souffrir à nouveau. À commencer par la restauration et la culture, décidément bien mal lotis depuis plusieurs mois. Bruno Le Maire, grand chef de Bercy, a reconnu que « cette mesure va avoir un impact direct sur des dizaines de milliers d’entreprises ». Jean Castex et lui sont montés au créneau pour réaffirmer l’État « protecteur », qui se porte au chevet des secteurs sinistrés. Le fameux « quoi qu’il en coûte », scandé par Emmanuel Macron. Le tour de vis sanitaire sera donc accompagné d’un coup de pouce financier, pour les entreprises bien sûr. Le ministre de l’Économie chiffre à un milliard d’euros le surplus d’aides à venir, et estime qu’« il est plus judicieux de renforcer le soutien économique aux entreprises plutôt que d’avoir à traiter des dizaines de milliers de faillites et une explosion du chômage ». Au menu : renforcement du fonds de solidarité, nouvelles exonérations de charges sociales et prolongement des PGE.
Limiter la casse
Le ressort central de l’aide aux entreprises, l’accès au fonds de solidarité, est de nouveau consolidé, comme l’a indiqué Bruno Le Maire : « Nous allons renforcer une nouvelle fois, simplifier et élargir le fonds de solidarité. » Concrètement, toutes les entreprises de moins de 50 salarié·es installées sur une zone qui observe le couvre-feu et qui ont subi une baisse de CA de plus de 50 % pourront toucher une aide allant jusqu’à 1 500 euros par mois, pendant toute la durée du couvre-feu. Les entreprises très impactées (restaurants, hôtels, cafés, sociétés de la culture, de l’événementiel, du sport…) pourront, elles, profiter d’un accès au fonds à hauteur de 10 000 euros par mois, comme c’était déjà le cas. Le changement : l’accès était conditionné à une baisse de CA de 70 %, le seuil est désormais abaissé à 50 %. Comme évoqué par Bercy depuis plusieurs jours, ce sont 75 000 nouvelles entreprises qui s’ajouteront à la liste des bénéficiaires du fonds.
Autre levier de soutien renforcé : le chômage partiel et les exonérations de charges. Pour les secteurs en difficulté, les fameux, le chômage partiel à plein temps, pris en charge à 100 % par l’État, est réactivé. Jusqu’à 4,5 smic et 80 % du salaire net pour les salarié·es. En parallèle, les entreprises fermées administrativement continueront de bénéficier de l’exonération totale de leurs cotisations sociales patronales. Idem pour les sociétés de l’hôtellerie-restauration, dès qu’elles perdent 50 % de leur CA.
La reprise attendra
Tour de vis sanitaire oblige, et malgré le renforcement de l’aide aux entreprises, la reprise économique est loin d’être favorisée. Les nouvelles mesures de restrictions, qui pourraient en appeler d’autres, devraient ralentir considérablement le rebond général de l’activité. Si le guichet des prêts garantis par l’État à 90 % est prolongé jusqu’au 30 juin, Bercy a également demandé à la Fédération bancaire française d’étudier le report d’un an du remboursement de ces prêts, pour les entreprises en difficulté. Le coût direct, pour les finances publiques, du renforcement des aides est limité, mais le « retour sur investissement » se fera attendre. Les fermetures et les limitations d’activité qui pèsent sur restaurants, sites de culture et autres lieux touristiques, sont autant de mauvaises nouvelles pour la reprise. L’épargne accumulée par les Français·es depuis le confinement, et dont le réinvestissement dans l’économie courante est érigé en enjeu majeur, l’a été notamment parce que les ménages ont peu dépensé auprès de ces mêmes entreprises en difficulté.
Quelques mots pour les jeunes et les soignant·es
Outre les entreprises, de nouvelles aides pour les ménages et les soignants ont également été évoquées. Après avoir essuyé une salve de critiques en provenance de tous les bords politiques pour ne pas avoir revalorisé les minimas sociaux ni prévu d’aides pour les jeunes, le gouvernement a annoncé des mesures pour les foyers les plus précaires. Lors de son annonce du couvre-feu, Emmanuel Macron a ainsi évoqué une aide de 150 euros pour les bénéficiaires du RSA et de l’allocation de solidarité avec 100 euros supplémentaires par enfant. Un dispositif déjà lancé au sortir du confinement et qui devrait profiter à 4,1 millions de ménages. Les jeunes, particulièrement fragilisé·es, devront se contenter de l’élargissement du dispositif « garantie jeune », qui accompagne les 16-25 ans vers l’emploi avec une allocation allant jusqu’à 497 euros par mois. Pour les soignant.es, Jean Castex a présenté une « indemnité compensatrice de congés annuels allant de 110 à 200 euros bruts par jour », pour les congés non pris à la Toussaint par les personnels de santé mobilisés. Enfin, l’augmentation de 93 euros du salaire des soignant.es initialement prévue pour mars 2021, devrait intervenir d’ici à la fin de l’année.
Adam Belghiti Alaoui