La ruée sur les vaccins, un constat d’échec ?

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Réussir à convaincre une majorité d’anti-vaccins à se ruer dans les vaccinodromes n’est pas une victoire. On oublie pendant ce temps qu’une maladie se soigne autant qu’elle se prévient…

Olivier Magnan, rédacteur en chef

Tout se passe comme si, en France, les 70 % de la population désireux de recevoir un vaccin constituaient une sorte de victoire électorale. Comme si le rôle d’un gouvernement avait été de renverser une tendance lourde – une majorité d’« antivax » – et qu’il en tire avantage.

Ce serait marcher sur la tête (ce qui n’est pas exclu) que de considérer ce « retournement » comme un gain politique.

Or le ministre Olivier Véran, quand il évoque ce chiffre, le présente manifestement comme un atout. C’est au fond un constat d’échec.

Car une population plutôt réticente à se faire injecter une chimie inconnue sans historique clinique se montre plutôt rationnelle, a priori. Être amené aujourd’hui à passer des heures dans des queues d’attente pour recevoir une injection ressemble bel et bien à une défaite. Les confinements successifs et les chiffres accablants des hospitalisations et des morts ont eu raison du secret espoir des gens de se passer de vaccin. Et c’est sans doute parce que lesdits vaccins sont arrivés tardivement dans un pays amené à les distribuer au compte-gouttes que la ruée s’est enclenchée – aidée par l’effet nudge très critiquable que j’ai décrit ici.

Tout le contraire de l’épisode H1N1 il y a une dizaine d’années : l’arrivée en masse d’un vaccin contre cette « grippe » que l’on craignait létale et qui ne l’était pas. Auparavant, au milieu des années 1990, les labos nous avaient fait le coup du vaccin contre l’hépatite B jusqu’à ce que la multiplication des cas de narcolepsie ne tue la poule aux œufs d’or. L’on voudrait culpabiliser aujourd’hui une population convaincue par la peur, rien d’autre.

Et désormais doublement punie : non seulement on crée (par une mauvaise stratégie à l’européenne) un effet de manque, mais quand on obtient des doses en nombre, les premiers effets létaux de vaccins bâclés – sans le recul habituel de plusieurs années – jettent la suspicion et un surcroît de crainte auprès des anti-vaccins convertis ! Qu’à cela ne tienne : l’AstraZeneca tue un peu, mais il faut l’écouler. Le Janssen tue d’emblée, mais on en a acheté, il faut l’écouler. Jusqu’à ce président de région qui veut commander du Spoutnik V – lui aussi vaccin de type adénovirus comme le Vaxzevria et le Janssen – sans se soucier des éventuelles conséquences (il s’honorerait à tout faire pour acheter du Pfizer ou du Moderna qui n’ont jusqu’à présent suscité aucun décès).

Gardons raison comme le Danemark, premier pays d’Europe à renoncer définitivement au vaccin AstraZeneca et sans doute logiquement dans la foulée au Janssen. Les Danois ont raison contre tous. Ils seront bientôt rejoints au nom du bon sens.

Car je le redis, la vaccination n’est sans doute pas le remède miracle. L’arrivée des variants nargue ce bel espoir. Comme l’exprime excellemment mon confrère Joffrey Vovos du Parisien, « la clé du succès se joue à l’échelle du globe ». Une 4e vague à l’automne sous l’effet de mutants ne se combattra pas à l’aide de vaccins sans cesse bricolés pour y faire face.

On oublie l’autre face de la lutte contre le virus : les traitements. Si l’hydroxychloroquine du Dr Raoult a été disqualifiée dans des conditions douteuses, on sait pertinemment bien que les anticorps polyclonaux (et non monoclonaux à l’américaine) seront le gage d’un enrayement de la covid, le médicament (et non le vaccin) à même d’éviter l’hospitalisation des contaminé·es et d’éviter la réanimation aux hospitalisé·es. C’est l’autre face de mon « combat » journalistique, revenir sans cesse sur celui que livre la start-up biotech française Xenothera.

Je vous en donnerai des nouvelles demain.

Olivier Magnan

PS : le sondage quotidien du Figaro a posé hier cette question : Croyez-vous à un retour à la normale cet été ? Les réponses de 176 000 votant·es : oui, 31,56 %, non, 68,44 %. On sait les Français·es pessimistes. Mais à la façon dont on les maltraite, ils et elles se révèlent plutôt réalistes.

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