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La course à la présidentielle 2022 a démarré. Piano-piano.
Encore une fois, fort probable que les Américain·es nous devancent. En termes de rebondissements. La série à suspense à laquelle s’adonnent Donald Trump, alias Rambo face à la covid-19, et Joe Biden, relègue à l’arrière-plan la présidentielle française, une partie d’échecs qui annihile toute prise de risque pour ainsi éviter la fausse manœuvre. Un jeu d’équations à somme nulle qui fait l’affaire du Président de la République Emmanuel Macron, principal favori à sa réélection.
Mai 2022. Macron rempile pour cinq ans. Après une victoire face à Marine Le Pen au second tour. On fera semblant de s’inquiéter d’un vote Rassemblement national qui grimpe, qui grimpe… sans jamais créer la surprise. Comme un sentiment de déjà-vu. Notre président s’en ira alors célébrer la victoire à la Rotonde. Ou ailleurs. Car on ne refait pas deux fois la même erreur.
Un éternel désenchantement pour le Rassemblement national, la faute à un boulet qu’il tire depuis des lustres, Marine Le Pen. Un sondage Elabe montre que six Français·es sur dix perçoivent la dirigeante du RN comme inquiétante.
MLP l’a bien compris, mais s’entête à espérer entrevoir un jour l’Élysée. Une illusion qui passera par un adoucissement de son image : des conseillers du parti d’extrême droite lui préconisent même de poser avec ses enfants dans Paris Match. « Une stratégie d’humanisation », avance Delporte, spécialiste en communication politique. D’ici là, même si elle martèle le contraire, Marion Maréchal aura tissé sa toile, déjà convaincue que sa tante « ne gagnera pas seule ».
La faute aussi à une gauche éparpillée façon puzzle, qui sans réel projet commun, subira la même déconvenue que Benoit Hamon en 2017 avec… 6,36 % des voix, synonyme de revers historique pour le PS. Mais alors, pourquoi la gauche peine tant à s’unir ?
D’abord pour une raison de divergences idéologiques. Difficile de mettre dans le même sac des électeur·rices d’EELV ou du PS avec un électorat estampillé France Insoumise, plus radical et antieuropéen. Des fractures sociologiques aussi, où règnent bobos urbains, prolos et jeunes de quartiers en lutte contre les discriminations.
Jean-Luc Mélenchon, lui, tente de faire oublier ses excès au profit d’une plus grande pédagogie. « La République, c’est moi ! » doit disparaitre, celui qui veut casser un système dans lequel il baigne depuis des décennies plaide pour une planification écologique. Quitte à empiéter encore un peu plus sur le terrain des écolos.
Et la droite dans tout ça ? À l’heure où François Baroin, perçu comme le candidat idéal chez Les Républicains, n’a jamais été aussi proche du renoncement, Xavier Bertrand place ses pions et polit sa candidature présidentielle. Avec au premier chef son engagement profond dans l’affaire Bridgestone. Selon un dernier sondage Ifop, le président des Hauts-de-France arriverait à 15 % d’intentions de votes derrière Le Pen et Macron.
Problème, la droite se voit dépossédée de ses sujets de prédilection. L’autorité a – plus que jamais – endossé le costume du Rassemblement national, pour mettre fin à « l’ensauvagement de la société ». Voilà un terme qui a d’abord été l’apanage de l’extrême droite et qui s’est réfugié dans le discours de… Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur « LREM ». Une appropriation des sujets qui brouille les pistes. Le fameux jeu à somme nulle dont je vous parlais…
Geoffrey Wetzel